Mémoire, se préparer à apprendre et à transmettre
Mémoire, se préparer à apprendre et à transmettre

Mémoire, se préparer à apprendre et à transmettre

Le saviez-vous ?

En Ayurveda, tout repose sur la transmission. Selon la  légende, Brahma, Dieu créateur, a enseigné la science médicale à Dakhma Prajapati, le géniteur, qui l’a transmise aux Asvin, les médecins des dieux qui l’ont à leur tour confiée à Indra, le roi des Dieux. Devant la survenue de maladies, les sages ont sollicité l’aide d’Indra et ils ont alors reçu la révélation lors de leurs méditations profondes (Samadhi). Ces Sages se sont ensuite transmis la base de ce qui deviendra l’Ayurveda de maîtres à disciples jusqu’à ce que Charaka et Sushruta (400 à 200 ans avant notre  ère) écrivent ce savoir dans les Védas, premiers textes «médicaux ».

 

Selon l’Ayurveda, une bonne mémoire est un signe de bonne santé. En effet, contrairement à l’Occident où on attend souvent l’apparition des symptômes d’une maladie neuro-dégénérative pour intervenir, en Inde on considère qu’il faut protéger et entretenir cet organe tout au long de la vie. La mémoire est un « outil » qui sert non seulement à chacun pour vivre au quotidien mais qui permet aussi de léguer, de transmettre les connaissances acquises. Avec l’Ayurveda, il n’est pas question d’oublier ce que contient la plus belle machine du monde : nous !

 

L’Ayurveda est une méthode de soins extrêmement ancienne. Elle trouve ses racines en Inde à une époque où l’écriture n’avait pas encore été révélée. Comme c’était le cas sur tous les continents, la transmission des savoirs se faisait donc à l’oral, de maître à disciple. La mémoire était « l’outil » indispensable de celui qui voulait apprendre !

 

Transmission de l’Ayurveda

L’élève qui suivait le praticien devait retenir une importante quantité de notions. En Ayurveda, les choses étaient peut-être plus compliquées que pour d’autres sciences, car celle-ci est une pratique holistique. Il y a donc une connaissance de l’Homme, mais aussi des plantes, de l’alimentation, des bonnes pratiques physiques et beaucoup d’autres éléments qui sont pris en compte. La somme de notions à acquérir était sans fin pour le disciple… A titre d’indication, la lecture du Rik Véda, l’un des quatre grands Védas, prend environ huit heures… A l’époque où la transmission n’était qu’orale, tous les élèves étaient capables de le réciter ! 

On sait aujourd’hui que les thérapeutes ayurvédiques et les élèves s’appuyaient sur une plante pour augmenter leur capacité de mémorisation et être en mesure de retenir les fondamentaux de la pratique ayurvédique : le brahmi (ou bacopa monnieri). C’est à cette époque très ancienne que ce végétal a donc commencé à être consommé comme plante médicinale et jusqu’à aujourd’hui, les étudiants indiens en font des cures régulières pour être performants tout au long de l’année. 

Les feuilles de Brahmi contiennent en effet des principes actifs, les bacosides A et B, qui stimulent les facultés intellectuelles, spécialement la mémoire à court terme et l’attention. Outre cette action très recherchée pour l’apprentissage, le brahmi régule aussi l’humeur et le niveau d’anxiété. Il favorise ainsi la mémorisation en période de révision, harmonisant le terrain en cas de surmenage et s’opposant aux pertes de concentration dues à l’âge, à la fatigue ou au stress. 

Lorsque quelques siècles plus tard, l’écriture a permis de transmettre encore plus vite et à un plus grand nombre toutes les connaissances de cette médecine, le praticien ayurvédique a gardé cette habitude de stimuler sa mémoire avec le brahmi, mais il a enrichi la pharmacopée avec d’autres plantes.

La centella asiatica ou gotu kola, a notamment été remarquée pour son action complémentaire à celle du brahmi. Cette plante semi-aquatique appartient à la famille des hydrocotyles. Plante médicinale de l‘Ayurveda, la centella asiatica est parfois utilisée comme anxiolytique, mais c’est surtout pour ses vertus sur le cerveau qu’elle est réputée. Elle permet en effet de stimuler la capacité de raisonnement et d’analyse pour une réflexion plus vive ! La centella asiatica contient de l’huile essentielle à 0,1%, des phytostérols, des caroténoïdes, de la vitamine C, des flavonoïdes et un peu de tanin, entres autres substances actives dont elle regorge !

Plusieurs plantes antioxydantes sont également excellentes pour stimuler la mémorisation : l’amalaki ou le moringa, par exemple. 

L’association du brahmi et de la centella appuiera toutes les initiatives pour apprendre en période d’examen ou de gros dossier à terminer dans une période stressante, mais ces plantes seront aussi efficaces au long cours, en cures régulières de trois mois tout au long de la vie. 

 

L’apprentissage en fonction des doshas

La notion de transmission occupe une place importante en Ayurveda, mais en fonction des doshas chacun reçoit les informations avec plus ou moins de vivacité intellectuelle... 

Une personne de constitution ayurvédique à dominante Vata peut avoir du mal à se concentrer et donc une mémoire un peu « paresseuse». C’est notamment dû au naturel créatif, enthousiaste, libre et joyeux d’un Vata qui passe rapidement d’un sujet à un autre !

Pitta étant plutôt vif, concentré et assoiffé de connaissances, il va saisir rapidement les informations et stocker principalement celles qu’il jugera utiles… Si cela ne l’intéresse pas sa mémoire sera moins bonne pour tout ce qui concerne les dates d’anniversaire... Ne comptez pas non plus sur lui pour retenir la liste de courses !

Avec leur esprit stable, les individus à dominante Kapha garderont longtemps le souvenir de ce qu’ils ont appris, même s’ils mettent un peu de temps à le mémoriser. La petite particularité de Kapha est de ne pas forcément chercher à en apprendre davantage et à se contenter de ce qui est déjà acquis, donc si votre dosha dominant est celui-ci, forcez-vous pour découvrir de nouvelles choses à retenir !

 

Nourrir la mémoire

La mémoire humaine s’enrichit avec le temps, au fil des expériences et des émotions ressenties, dans le plaisir d’échanger et d’apprendre, mais aussi dans le silence ou le sommeil. C’est un organe qui a besoin d’une « alimentation » bien spécifique et basée notamment sur les Omega 3 et 6 contenus dans les huiles végétales et les poissons gras ou sur des substances riches en minéraux, comme le shilajit (substance mi-végétale, mi-minérale) par exemple. 

Par ailleurs, en plus de l’alimentation, des recherches réalisées en Occident ont permis de démontrer qu’un déficit de la mémoire était lié à une carence en vitamine D. Cette vitamine est donc désormais bien identifiée pour stimuler le niveau de neurotransmetteurs et stimuler les messages chimiques du cerveau. Elle est synthétisée par la peau grâce à l’exposition au soleil.

 

Vieillir est une chance

Les plus grands scientifiques cherchent le moyen de nous faire vivre au-delà de 100 ans et pourtant notre société occidentale a peur de la vieillesse… Or laisser filer le temps est une chance quand on en profite pour acquérir sagesse et maturité et surtout transmettre son savoir. La « personne âgée » a souvent vécu de nombreux événements, des changements sociétaux, parfois des conflits ou des périodes heureuses et elle en a tiré des enseignements qui serviront aux générations futures si celles-ci prennent le temps de les écouter. 

En effet, depuis l’invention de l’écriture, les méthodes de transmission ont bien évolué et aujourd’hui nous sommes à l’ère du presque tout-numérique avec cette impression que la mémoire n’a plus sa place dans notre quotidien. Mais à force d’utiliser tous nos appareils comme des disques durs externes et de ne plus rien retenir, saurions-nous cultiver un radis ou une pomme-de-terre sans tutoriel ? Saurions-nous reconnaître si la mer est calme ou menaçante ? Saurions-nous observer les nuages avant de partir en randonnée dans les montagnes ? Les Anciens ont cette connaissance et c’est ce qu’il faut cultiver tout au long de sa vie.

 

Toujours apprendre

Notre manière de vivre conditionne notre vieillesse, mais pas seulement, il y a aussi la manière d’aborder le monde qui nous entoure. On le sait désormais, bien vieillir, c’est rester «enseignable ». Ce terme renvoie à deux significations : 

- Avoir envie de continuer à apprendre. La curiosité se provoque et passe notamment par des relations sociales épanouies, qu’il s’agisse de la famille, d’amis ou de collègues de travail. En échangeant avec d’autres, la stimulation des neurones se fait naturellement. Le pire ennemi de la mémoire étant sans doute la fameuse phrase « ça ne me servira à rien d’apprendre ça » !

- Posséder la capacité physique de se concentrer et de mémoriser. Des aides telles que les plantes ou les nutriments pourront « alimenter » le cerveau autant qu’il en a besoin. Par ailleurs, il ne faut pas hésiter à être intransigeant avec sa mémoire. Ne vous dites pas que ce n’est pas grave si vous avez oublié le prénom de votre voisin, mais faites au contraire un effort pour le retrouver! 

 

Vata : l’âge de la transmission 

Selon l’Ayurveda, il existe trois temps majeurs dans notre vie et parfois même un quatrième. Chacun correspond à des schémas communs entre tous les individus. 

La naissance, l’enfance et l’adolescence, jusqu’à 25 ans environ sont des moments Kapha, le dosha terre et eau. Chacun prend racine dans l’existence et y pousse tranquillement. C’est le moment des bêtises, de l’innocence et de l’apprentissage. C’est à cet âge que nous sommes à la recherche de Kama, le plaisir, à travers le monde qui nous entoure. Cette période est appelée Brahmacharya (Brahman : « absolu » et «cârya », se mouvoir en sanskrit), ce qui signifie l’apprentissage et la discipline. La mémoire et la concentration sont sollicitées en permanence pour acquérir les savoirs et les compétences qui conduiront à l’âge adulte.

L’âge adulte justement, correspond à la période Pitta, le dosha feu et eau. C’est le temps de la vie familiale, de l’énergie, de l’activité sous toutes ses formes. Cette période nommée Grihastha (griha = maison) va de 25 à 50 ans environ. A ce moment-là, tout est mouvement, accélération et impulsion. En s’appuyant sur ce qui a été acquis dans la période Brahmacharya et en puisant dans le savoir des Anciens, l’individu construit sa vie.

Vana-Prashta (vana signifie « forêt, source », prashta « qui est établi ») est l’âge de la maturité et notamment celui de la ménopause pour la femme. Vers 50 ans environ. A ce moment-là, les enfants ont grandi, la réflexion devient plus philosophique et les souvenirs engrangés atteignent une certaine maturité. Vata domine ce temps de la vieillesse. Il n’y a plus rien à prouver, mais tout à donner, à transmettre. C’est le temps de la réflexion, du savoir et de la transmission. Les grands-parents aident à élever les petits-enfants en donnant de leur temps et de leur savoir. Les relations sont apaisées, plus légères, notamment grâce à l’influence de Vata qui est air et espace. Il est fréquent que ceux qui entrent dans cette période de vie s’impliquent en politique ou dans des activités sociales qui nécessitent leurs connaissances.

Il existe parfois une 4ème phase : la période Sanyasa. Elle peut être traduite par « renoncement » mais c’est en réalité une période de douceur, de lâcher-prise et de confiance accordée aux plus jeunes à qui l’on a transmis le savoir. Sanyasa n’est pas une étape obligatoire et il est fréquent que les grands-parents restent dans la période Vana-Prashta pour aider leurs descendants, particulièrement à notre époque où l’espérance de vie en pleine santé augmente.

 

En conclusion

Il y a tellement à apprendre et à transmettre, qu’il serait dommage de se priver de ces échanges entre les générations. L’Ayurveda accorde un profond respect aux enseignements des Anciens et l’Occident réapprend à utiliser leurs savoirs, car transmettre est sans doute le meilleur moyen de préserver la mémoire.

Une hygiène de vie saine, une alimentation équilibrée, une activité physique et de bonnes nuits de sommeil contribueront également à préserver notre « capacité de stockage » et ce à tous les âges de la vie ! ■

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